Qu’est ce qui conduit 700 spectateurs(rices) à s’installer dans une salle, ensemble en pleine obscurité, si proches les un(e)s des autres presque collé(e)s sans se connaitre. Qu’est ce qui fait que des adultes croient intensément à une histoire racontée par des comédiens jouant sur le plateau ?
Le désir du partage, la découverte, l’émotion, le divertissement, l’inattendu, l’ouverture sur le monde, le voyage intérieur …? Certainement un peu de tout cela. Mais sans doute aussi parce que le spectacle est une réalité augmentée.
Le spectacle donne à voir, à entendre. Il a besoin d’attention, d’écoute, il oblige des mots sur un sentiment à la sortie de la salle. La programmation de spectacles invite les spectateurs à se poser et à se concentrer sur le sujet évoqué, sur le récit, sur les gestes, sur le propos et sa mise en espace. Le spectacle épaissit la réalité. Il zoome sur les détails d’un récit ou d’un geste, il intensifie les voix. En cela, il invite à un autre espace-temps.
Cette même expression « réalité augmentée » est aujourd’hui utilisée pour évoquer une nouvelle technologie où un modem se pose entre la réalité et sa perception.
Qu’est ce qui oppose ou réunit ces deux réalités ? Le spectacle vivant est nommé ainsi parce qu’il se déploie face au public. La réalité augmentée numérique a besoin d’un outil, d’un intermédiaire qui prolonge et détourne une perception immédiate.
Spontanément on pourrait les croire opposées. Mais c’est l’attention dont chacune a besoin qui les réunit et qui conditionne notre perception en conscience. C’est bien ce que fait l’artiste et en cela il nous est utile. Il s’empare et se concentre sur des éléments, des faits, des images, des pensées pour nous les montrer, nous les décrire voire les détourner et en cela il nous invite à cette conscience.
Carole Lardoux – Directrice Artistique